Comment faire pour qu'entreprises et jeunes talents diversifiés se rencontrent?
Des gens, des histoires Comment faire pour qu'entreprises et jeunes talents diversifiés se rencontrent? Étroitesse du marché du travail oblige, les entreprises éprouvent bien des difficultés à recruter. Pourtant, de nombreux jeunes issus d'horizons culturels divers rencontrent aussi de grandes difficultés à trouver un emploi ou un lieu de stage. Youssef Kobo, fondateur et force motrice de A Seat At The Table, et Els Overbergh, Chief Human Resources Officer chez Baloise, analysent les problèmes et cherchent ensemble des remèdes.
Étroitesse du marché du travail oblige, les entreprises éprouvent bien des difficultés à recruter. Pourtant, de nombreux jeunes issus d'horizons culturels divers rencontrent aussi de grandes difficultés à trouver un emploi ou un lieu de stage. Youssef Kobo, fondateur et force motrice de A Seat At The Table, et Els Overbergh, Chief Human Resources Officer chez Baloise, analysent les problèmes et cherchent ensemble des remèdes.
Quel regard Baloise porte-t-elle aujourd'hui sur le marché du travail?

Els Overbergh: Le marché du travail est très concurrentiel, c’est indéniable. Nous avons en permanence une cinquantaine de postes vacants chez Baloise. Et c'est encore plus compliqué pour les emplois en lien avec la technique des assurances et les fonctions IT que pour d'autres fonctions puisque nous pêchons dans ce cas dans le même petit vivier que les autres assureurs et d'autres grandes entreprises. De nombreux collègues dans notre société atteindront en outre l'âge de la pension d'ici cinq à dix ans, ce qui risque de nous faire perdre beaucoup de connaissances et d'expertise. Voilà les défis auxquels nous sommes confrontés.

Que faites-vous pour essayer de séduire les candidats?

Els Overbergh: Nous proposons un package global attractif, avec un travail intéressant, une rémunération compétitive, des conditions de travail agréables avec un bon équilibre entre travail et vie privée, ... Mais comme beaucoup d'autres employeurs font la même chose, ça ne suffit pas.

Nous misons sur plusieurs canaux pour trouver des collaborateurs: notre site d’offres d’emploi, un bonus pour les collaborateurs qui proposent quelqu'un, des stages ou jobs de vacances intéressants, un parcours pour jeunes talents où les jeunes peuvent découvrir différentes fonctions au sein de Baloise, … Nous travaillons aussi avec des partenaires externes, demandons à nos propres collaborateurs de partager nos offres d'emploi sur leurs réseaux sociaux, ... et il y a aussi le Baloise Jobswitch qui s'adresse aux personnes qui n'ont aucune connaissance particulière en matière d'assurances et qui, par conséquent, n'envisageraient jamais de postuler chez nous. Nous leur offrons la possibilité de découvrir notre société et si ça matche, nous leur proposons un parcours de formation complet et sur mesure. Nous espérons ainsi convaincre des personnes de venir travailler dans le secteur des assurances même s'il ne figurait pas a priori dans leur top 3. En résumé, nous essayons de nombreuses choses.

Youssef Kobo: Je trouve ça très positif d'expérimenter. La Belgique affiche les plus mauvais chiffres de tous les pays de l'OCDE en matière de taux d'emploi et de taux d'enseignement pour les personnes issues de l’immigration. Et pourtant, chaque CEO avec lequel je parle me dit qu'il ne trouve pas de collaborateurs. Il y a clairement quelque chose qui cloche! Il y a énormément de jeunes talents divers qui cherchent un emploi. Mais les deux camps ne se rencontrent que trop rarement. Les idées du passées ne suffisent plus.

Nous devons trouver de nouvelles recettes, d'autres manières de mettre les entreprises et les jeunes talents en contact. Pour cela, il faut des initiatives concrètes comme celles que nous lançons avec A Seat At The Table: des tables rondes avec les CEO, des voyages d'étude, des podcasts, ... Tous ces projets sont organisés dans les entreprises, pas dans les écoles ou les quartiers. Ce n'est pas avec des présentations PowerPoint remplies de théorie qu'on réglera le problème, mais avec des contacts concrets où jeunes et entreprises apprennent vraiment à se connaître. C'est le seul moyen de supprimer tous les obstacles.

Peut-on parler de peur de l’inconnu de la part des jeunes issus de l’immigration?

Youssef Kobo: Absolument! Beaucoup de ces jeunes n'ont pas un réseau très étendu et partent déjà du principe fataliste que les entreprises ne les embaucheront de toute façon pas. Avec A Seat At The Table, nous essayons de leur donner davantage confiance en eux, nous travaillons sur leurs compétences douces et nous leur donnons la possibilité de découvrir tous les aspects de la vie en entreprise en l'espace d'un an. Cela fonctionne du reste dans les deux sens. Je peux vous assurer que beaucoup de CEO écarquillent les yeux lors de telles tables rondes. Dans bon nombre de ces entreprises, la population des travailleurs est encore loin d'être diversifiée et les responsables des ressources humaines ne voient pas suffisamment les possibilités qui s'offrent à eux.

Els Overbergh: Je pense que la diversité est déjà une réalité chez Baloise, même si on peut toujours faire mieux. Nous voulons être un employeur où chaque collaborateur se sent chez lui, quels que soient son sexe, ses origines ou son âge. Nous avons tous inconsciemment des préjugés. C'est à nous d'en prendre conscience pour offrir les mêmes chances à tout le monde. Nous devons être ouverts à différents profils diversifiés dès le processus de recrutement. Mais aujourd'hui, cela va plus loin que le simple fait d'être ouvert. Nous devons aussi convaincre activement les jeunes de postuler. Les entreprises doivent séduire les candidats.

Youssef Kobo: Le mot "séduire" décrit bien ce à quoi les entreprises sont confrontées aujourd'hui. Beaucoup d'employeurs partent du principe que les jeunes candidats savent ce que fait leur entreprise. C'est une illusion. Bien souvent, les jeunes ont à peine une idée des fonctions qui existent au sein d'une société. Quand une entreprise publie une offre d'emploi, cela se fait entre autres dans les journaux, à la radio et à la télévision. Mais les jeunes n'utilisent pratiquement plus ces canaux de nos jours. Ils sont actifs sur les réseaux sociaux et c’est en ligne qu’ils trouvent leurs infos. La plupart des offres d'emploi présentent en outre toujours les mêmes images et slogans: un open space où on rigole. Cela ne parle pas aux jeunes. L'entreprise doit expliquer qui elle est, ce qu'elle fait et comment elle se démarque. Et elle doit le faire de manière très concrète.

Els Overbergh: Baloise mise fortement sur sa culture d'entreprise. Nous sommes intimement convaincus que des collaborateurs engagés donnent des clients et des partenaires satisfaits, ce qui profite à son tour à la croissance et à des investisseurs satisfaits. La satisfaction du personnel représente chez nous un thème central et aussi un objectif dans le cadre de notre stratégie. Nous assumons aussi nos responsabilités sociétales et soutenons diverses initiatives en matière de soutien aux communautés, de sécurité, de prévention et d'environnement. Nous avons par exemple des partenariats avec l'Hôpital universitaire d'Anvers et avec Natagora. Avec Baloise for Life, une initiative de notre personnel, nous collectons de l'argent pour toute une série d'œuvres caritatives.

Youssef Kobo: Cela permet clairement d'entrer en contact avec les jeunes. Je remarque que les jeunes recherchent des entreprises qui s'engagent, qui se battent pour quelque chose. La génération actuelle est bien plus engagée socialement que les générations précédentes. Le "pourquoi" est toutefois trop rarement abordé dans les communications des entreprises. Il s'agit naturellement pour les jeunes de trouver un emploi sympa avec de bonnes conditions de travail, mais en définitive, ils veulent plus que cela. Il doit y avoir une histoire derrière tout ça, ils veulent savoir pourquoi une entreprise fait ce qu'elle fait.

Quelle est l'importance d’un bon diplôme de nos jours?

Els Overbergh: Un diplôme n’a plus la même importance qu’il a eu auparavant. La pénurie sur le marché du travail a changé nos priorités. Nous nous fixons moins sur les diplômes. Nous devons identifier les connaissances et les compétences qui sont absolument indispensables pour une certaine fonction et reconnaître les domaines pour lesquels nous pouvons former nous-mêmes les nouveaux collaborateurs. Nous avons par exemple décidé d'assouplir les exigences en matière de diplômes pour le Young Talents Program qui est désormais ouvert aux masters comme aux bacheliers. Cela nous permet de toucher un groupe plus important de jeunes talents.

Youssef Kobo: C'est une bonne décision, je trouve. Ce n'est pas seulement une question de diplôme, c'est aussi et surtout une question d'attitude au travail. La formation sur le tas est devenue beaucoup plus importante. Le fétichisme des diplômes doit disparaître.

Quels sont selon vous les principaux avantages d’un personnel diversifié?

Youssef Kobo: Des points de vue différents sont clairement une valeur ajoutée importante, d’après moi.

Els Overbergh: C'est exact. Des équipes diversifiées rendent les débats plus riches et aboutissent à de meilleures décisions. Baloise veut aussi porter un regard ouvert sur la société: nous proposons des produits pour un public diversifié, il est donc logique d'employer aussi des personnes issues d'horizons différents. J'espère que la diversité ne sera même plus un thème d'ici dix ans et que nous penserons et agirons tout naturellement dans un esprit de diversité d'ici là.

A Seat At The Table

Youssef Kobo est un des visages de notre campagne "Votre façon d'entreprendre inspire la nôtre" destinée aux entreprises. Lisez ici le témoignage de Youssef sur sa société A Seat At The Table.